mercredi 6 mai 2009

Séparation

Quand tu seras vidé de ce qui était toi,
quand la cire sculptée aura chassé la chair,
quand le silence lourd effacera tes mots,
quand tu déposeras ton fardeau de fatigue,

alors autour de toi, empruntés et figés,
assemblés au hasard en grappe disparate,
inconfortablement douloureux ou gênés,
nous redessinerons les traits de ton visage.

Réunis par le deuil, nos credo divergents
plus que jamais sans doute nous sépareront tous.
Perdus dans nos pensées, nos cris ou nos prières,
c'est simplement la Mort que nous affronterons.

Quand tu seras paisible, délivré de tout mal,
nous restera au cœur la souffrance insondable.
Quand tu voyageras, ailleurs ou nulle part,
nous resterons cloués au poids de la matière.

Un instant fugitif, nous verrons le fossé
s'élargir entre nous, entre toi et le monde.
Nous sentirons le temps déchirer ce moment
plus vulnérable encore que l'espace de ta vie.

Au seuil de la vieillesse, peut-être saurons-nous
ce qui depuis ce jour nous aura tant manqué.
Puis l'ombre reviendra, rassemblant sous son aile,
au fond du puits béant, nos âmes fusionnées.

7 commentaires:

  1. Je découvre en cette fin de matinée ton poème ... Enorme !!!
    C'est ce côté aussi que j'apprécie chez toi, tu es capable de passer de la légereté des mots à la rigueur et à la profondeur de tes propos, je ne parle même pas de tes alexandrins magiques, j'aime la musique aussi de cette belle poésie !

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  2. pour garder en mémoire l'aimé perdu...toujours...

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  3. Brrrr....ça me fait tout chose ton poème, limite j'ai les larmes qui arrivent à mes nyeux...Je ne vais pas répéter ce qu'à dit Foxxy, mais il a tout à fait raison !! en tout cas...que d'émotions !

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  4. Enorme, Foxxy ? Ben oui : 24 alexandrins, c'est presque un mille-pattes ! J'ai du battre mon record de pieds :)

    Pour répondre à votre émotion, je partagerai la mienne. Ce poème est né d'une vague de souvenirs des obsèques, deux années successives, de mon père puis de ma mère. Il y a plus de 10 ans de ça, mais le travail de deuil est parfois bien long... et je crois que c'en est l'aboutissement. Il aura fallu tout ce temps pour que se traduisent les impressions ressenties alors, enfin passées au filtre d'une réflexion apaisée.

    Merci d'avoir partagé l'émotion, mais aussi la conscience que quelque chose, si impalpable que ce soit, reste de ceux que nous aimions.

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  5. Avec tes "explications", ça fait encore plus monter les larmes aux yeux...ça n'a pas du être facile de perdre ses deux parents dans un laps de temps si proche...en fait, non, c'est toujours très dur de perdre ses parents...J'ai encore les deux miens, et je ne sais pas dans quel état je pourrai être lorsqu'ils disparaitront. Parfois j'y pense, et je pleure...c'est bête, non? j'ai tellement peur de perdre ceux que j'aime...Donc je me doute que la douleur est toujours là, présente, même 10 ans après.....
    Bisous ma petite Fantôme qui a fait un poème magnifique !

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  6. BONJOUR CE POEME EST MAGNIFIQUE ET LE REPOS DE L'ÄME EST BIEN DECRITE....BONNE JOURNEE!!!BISOUS!!!

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  7. Encore des commentaires qui s'étaient cachés dans mon crash picique !

    Clélia, ce sont tes commentaires aussi qui sont émouvants. Nous sommes bêtes toutes les deux sans doute : pleurer en pensant à la mort possible de ceux que j'aime, ça m'est aussi arrivé ! Et, oui, ces deux morts successives ça avait été très dur; en un an le premier choc n'était pas surmonté et je n'avais plus de ressort pour affronter le second... Heureusement mon compagnon était bien présent et me savoir comprise, avec délicatesse, m'a aidée à franchir le cap.

    Mais ce qui reste dix ans après, c'est finalement cette idée de repos final/délivrance pour eux (le repos de l'âme, comme dit Bulle Noire) et le souvenir de ma fratrie unie dans sa perte. Je m'en étais éloignée et ça a été le début d'un rapprochement, qui m'est aujourd'hui infiniment précieux, avec mon frère surtout puis ses enfants que j'ai quasiment découverts une fois adultes et dont je me sens très proche. Ca donne une autre perspective sur le déroulement de la vie, avec ses pertes et ses gains...

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